jeudi 1 mai 2014

Sarah mène "24 jours" d'horreur

Il y a des images que l’on sait, par avance, qu’on n’oubliera jamais. On le sait, dès qu’on les voit. Les dernières images de la vie d’Ilan dans le film d’Arcady « 24 jours » en font parties. Comme les larmes qui restent coincées aux coins des yeux, ces images restent imprimées sur ma rétine.

A la sortie du film, on sort une cigarette, on l’allume. Chaque bouffée apaise un peu l’angoisse encore présente. Vient alors la série des « SI ». « Et si la police avait été plus scrupuleuse », « et si le voisinage avait été plus à l’écoute », « et si une personne avait prévenu, parlé… » Pendant tout le film, on n’a pas pu s’empêcher d’espérer, tout en connaissant parfaitement la fin inexorable de l’histoire. Et pourtant ce n’est pas une histoire, c’est une réalité. Ilan avait mon âge, et pourtant, il n’a pas eu le temps d’avoir les problèmes et les bonheurs de mon âge. Il était juif, on l’a tué. Aussi simple et glaçant que ça.

On sort une deuxième cigarette, et on se plait à espérer. Espérer que ce film fera réfléchir, qu’il sera vu par des lycéens. Le nombre de jeunes gens dans la salle est surprenant, ils ont pour beaucoup entre 16 et 18 ans. Peut-être cela permettra-t-il que ça n’arrive plus jamais. Plus jamais ça, on l’avait déjà dit. Je me souviens, Simone Veil l’avait répété plusieurs fois en 2005, lors de l’anniversaire des 60 ans de la libération des camps. On l’avait déjà crié sur tous les toits et pourtant c’est arrivé.  Il était juif, on l’a tué. Aussi simple et glaçant que ça.

On essaye de changer de sujet, et pourtant je ne pense qu’à ça, on ne pense qu’à ça. Même en tapant ces mots, je trouve qu’ils sonnent creux et qu’ils paraissent vides de sens face à cette triste réalité, face à ses images si marquantes et si dures. Ilan est né 10 jours après moi. Sa mère doit avoir l’âge de la mienne, son père l’âge du mien. Ilan avait 23 ans quand il est mort. L’âge de mon petit frère aujourd’hui. Il était juif, on l’a tué. Aussi simple et glaçant que ça.

« Et si »… non, je ne veux pas commencer à penser à ça… Et pourtant…

Ce film a humanisé ce qui n’était que titres de presse et premières images de journaux télévisés. Des mots sont devenus des images. Un nom est devenu une personne avec une famille, des amis, une petite amie. Il était juif, on l’a tué. Aussi simple et glaçant que ça.

On n’oubliera jamais Ilan. On ne laissera plus jamais faire.


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